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Le western c’est avant tout semble t-il une histoire de cinéma. Les grandes épopées, les grandes histoires ont déjà existé sur grand écran. Puis vint la bande dessinée, qui raffolait de l’image animée et fit du cinéma souvent un objet de référence. Puis est venu un temps ou le cinéma a rendu hommage à la BD. Au jour d’aujourd’hui cela devient plus rare, tant il pourrait sembler que le filon s’épuise quelque peu, et tant on va un peu trop souvent - et nous parlons autant du cinéma que de la bande dessinée - vers une description clinique, violente et sombre ; ce qui tends à créer des œuvres assez complexes.
On ne peut alors s’empêcher de se poser la sempiternelle question : bon, et maintenant, mais qu’est-ce que j’en retiens ?
Car avant tout l’œuvre, qu’il s’agisse d’un livre ou d’un film, doit nous interpeller et nous aider à en conserver suffisamment pour qu’elle demeure en nous ; une référence, un sujet, un objet de débat…
Pour cette belle bande dessinée revendiquant haut et fort une recherche et une esthétique forte, et qui de plus emprunte autant au cinéma qu’à la littérature ; le scénariste Tiburce OGER s’est approprié divers thèmes et les a revisité grâce à la plume de ses illustrateurs. De la vie des amérindiens, aux scènes de chasses ou de guerres, passant d’une époque à une autre, d’un endroit à un autre ; Indians a un souffle épique qui le lie aux grands espaces, mais également à l’intimité des gens, des bons et des méchants, de multiples pays et ethnies, dans ces vastes contrées qu’on redécouvre par petites touches.
Et avec l'aide inspirée de ses divers auteurs aux traits différents mais tous superbes ; d'auteurs donnant le meilleur d’eux mêmes afin de donner vie à ces péripéties ; le scénariste nous convie à un voyage, une redécouverte.
Alors peut-on dire qu’il s’agit d’une réussite ? La réponse est certainement oui ! Inspirée et pensée avec efficacité et poésie, Indians est une œuvre aboutie, très riche (et on ne parle pas que du nombre de pages) et qui enthousiasmera les amateurs de beaux dessins et de belles images, images qui renvoient finalement plus au cinéma qu’on ne voudrait le croire.
Bourrées de références et de clins d’œil, les histoires sont des petits joyaux dont la brièveté ne nous gênera pas.
Superbement dessinées (mais ça vous l’aviez compris) et mises en couleurs, elles sont également une mine d’information ; et pour celui qui aura cet ouvrage en main, il ne fera nul doute que le western vient de s’enrichir d’une pépite.
Synopsis : En quatorze histoires, Go West young man retrace la conquête de l’Ouest américain, de 1763 à 1938. Des conflits des grands lacs au désert du Mexique, les destins se succèdent. Trappeurs et pionniers, tribus indiennes, desperados et prostituées vont se battre et survivre dans les grandes plaines, les villes champignons et les guerres interminables. Si les grands thèmes sont à l’honneur dans cet album, c’est le côté obscur des Hommes qui ressort, présentant avec un goût amer le rêve américain. Racisme, génocide indien, condition des femmes, guerres et misère. Go West young man est un hommage au western, mais un hommage lucide.
Scénario : Tiburce OGER
Dessins : Benjamin BLASCO-MARTINEZ, Christian ROSSI, Ronan TOULHOAT, Félix MEYNET, Dominique BERTAIL, Hugues LABIANO, Paul GASTINE, Michel BLANC-DUMONT, Corentin ROUGE, Laurent HIRN, Emmanuel BAZIN, Mathieu LAUFFRAY, DERIB, Jef, Dimitri ARMAND, Laurent ASTIER, Christophe REGNAULT,
Couleurs : Jack MANINI, Jocelyne CHARRANCE
Sylvain Ménard, octobre 2022