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Monsieur AZNAVOUR, le film de Mehdi Idir et Grand Corps Malade avec l’impressionnant Tahar Rahim, est un bijou à voir absolument

11 novembre 2024 - 20:00
'Monsieur AZNAVOUR' est un moment à part, un condensé (à défaut d’un autre mot), de la vie d’un homme, et quel homme ! Œuvrant afin de nous offrir une vision (leur vision) les deux réalisateurs, Mehdi Idir et Grand Corps Malade, ont réussi à donner vie à un grand monsieur de la chanson française, avec élégance et pudeur. Sans entacher leur travail de réflexions déplacées ou sans objet, leur film - un biopic comme on aime les nommer aujourd’hui - s’attache au temps fort de sa carrière, les recontextualisant ; et tellement de choses que nous ignorions, nous sont alors livrées !
Acteur somme toute discret que l’on avait déjà pu remarquer, depuis Un prophète en 2009, Les Anarchistes en 2015, les séries comme Le Serpent en 2021 ; Tahar Rahim nous semble porter le rôle au delà de tout consensus et sans aucune réserve, nous offrant un portrait pétrit de véracité (primordiale si ce n’est nécessaire) mais surtout de sincérité et d’empathie avec la personnalité que fut Charles Aznavour.
Il est sans nul doute facile de crier au génie, à la puissance du réalisme de cette biographie, sans ne pas dire à quel point les deux auteurs, Mehdi Idir et Grand Corps Malade, ont travaillé leur sujet de sorte que le public puisse être au rendez-vous. Car ce n’est pas un film pour l’intelligentsia ni les bobos, c’est un film grand public, pour le public, qui vous fait ressentir de la tendresse pour ces personnages, nous invitant à partager cette ‘vie’ avec eux.
Sans superficialité, ni recherche d’une forme d’empathie déplacée - et les moments de doutes, de craintes ou de pertes (car Aznavour a eu une vie complexe, pleine et dont les chagrins n’étaient pas absents) sont également évoqués - nous avons comme l’impression de toucher du bout des doigts la vie de cet homme, cet icône de la chanson française et de notre culture.
Usant de quelques prothèses et ayant recours à quelques effets de rajeunissement - mis au service d’une histoire - Monsieur AZNAVOUR est une réussite parce qu’il n’a pas cherché à rendre justice à l’homme, mais bien à raconter une histoire. Et n’est-ce pas cela que l’on attendait d’un tel projet ?
Aussi quelle importance que les deux réalisateurs et la production aient privilégié telle technique de trucage pour rendre plus ‘semblables’ les acteurs, plus proches de leurs personnages, plutôt que telle autre ? Car n’est-ce pas la qualité du travail de l’acteur et sa faculté à faire oublier ‘qu’il n’est pas’ le personnage qu’il interprète, qui est le plus important ?
Et c’est ce travail d’acteur, l’implication et le jeu au service d’une histoire qui apporte une humanité incroyable aux personnages, parce que même si l’on pensait connaître le chanteur on s’aperçoit rapidement qu’il n’en est rien.
Et de Tahar Rahim qui incarne le rôle titre, en passant par un toujours excellent Bastien Bouillon, dans le rôle de Pierre Roche ; à la ‘solaire’ et gouailleuse à souhait Marie-Julie Baup dans le rôle de Piaf, au jeune Victor Meutelet (trop brièvement aperçu dans celui d’un tout jeune Johnny Hallyday) ; tous les acteurs trouvent leur place dans cette belle histoire, une fresque humaine avant tout.
Monsieur AZNAVOUR nous donne ainsi la possibilité de voir ce qu’il était, un homme passionnant qui n’était sans doute pas exempt de défaut, mais qui a toujours su se battre et aller de l’avant, perfectionniste, ouvert aux autres, en quête perpétuelle d’approbation et de reconnaissance.
‘Une vie évoquée’, telle serait l’expression que nous aurions employé pour qualifier du mieux l’impression vécue tout du long du métrage qui opte pour un point de vue précis, nous offrant quelques belles performances d’acteurs, quelques numéros qui resteront ancrés dans nos mémoires comme des instants partagés.
Les ‘biopics’, un mot trop moderne qui finalement ne signifie plus grand chose, nous permettent de plonger dans des histoires, celles de personnalités de notre temps - oui, sinon comme pour le Napoléon de Scott, il s’agit plus d'un 'film historique' - et qui nous ont marqué. Et comme dans toute ‘adaptation’ il est évident que le ‘biopic’, la biographie (voire l’autobiographie), n’est pas - et ne peut être -, autre chose qu’un reflet, un condensé d’une existence vu au travers d’un prisme et d’un regard, celui de son créateur.
Monsieur AZNAVOUR est tout cela à la fois, un film d’auteur, une biographie, un message adressé par ses réalisateurs à un homme qui nous a marqué… et certainement pas un film qui en deviendrait ‘documentaire’ par la force des choses !
A ce stade, nulle contestation quant à la place qu’occupe Charles Aznavour dans notre histoire musicale française, celle d’un grand auteur, d’un grand parolier, et dont tout un chacun est capable (avec plus ou moins de succès) de fredonner les paroles d’une de ses chansons.
Synopsis : Fils de réfugiés, petit, pauvre, à la voix voilée, on disait de lui qu’il n’avait rien pour réussir. À force de travail, de persévérance et d’une volonté hors norme, Charles Aznavour est devenu un monument de la chanson, et un symbole de la culture française. Avec près de 1200 titres interprétés dans le monde entier et dans toutes les langues, il a inspiré des générations entières. Découvrez le parcours exceptionnel et intemporel de MONSIEUR AZNAVOUR.
Sylvain Ménard, novembre 2024