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Comment je suis devenu super-héros

13 juillet 2021 - 08:25
Comment je suis devenu super-héros est sur nos (petits) écrans, visible sur Netflix. L’occasion pour nous de faire un petit point sur un genre inexploité en France, par le biais de ce métrage qui nous propose une vison plus européenne du thème du super-héros.
Dans une approche qui renvoie à notre culture (européenne par définition), mais où l’on sent l’influence de certains Romans Graphiques parfois décalés, souvent irrévérencieux, quand il ne s’agit pas de nos vieilles BD, très éloigné en cela de l’esprit américain ; ce film est un bon exemple de déclinaison de ce mythe quasi olympien qu'est celui du super-héros !
Curieusement le film est bien meilleur qu’il n’y paraîtrait au premier abord - "comment, des français qui réalisent un film avec des super-héros !?" - et ce même s’il est par moment assez ‘téléphoné’, quelques péripéties ayant finalement un peu de mal à nous étonner ou nous surprendre totalement ; mais l’ensemble est suffisamment bien mené, la mise en scène fluide et l’intrigue bien construite, pour réussir à nous faire passer un bon moment. On pourra penser que réaliser un film qui s’insère dans un genre précis, codifié à l’extrême, est automatiquement régi par des contraintes qui doivent autant répondre aux questions du spectateur (le fameux : qui, pourquoi, quand) et immédiatement établir le ‘mode’ central choisit ; à savoir le réalisme, l’humour, la comédie ou la satire. C’est effectivement le cas et ici ce sera par un biais réaliste, qui permettra en décrivant ce futur où se côtoient deux mondes - l’un ordinaire, l’autre extra-ordinaire - de développer l’histoire.
Les acteurs sont convaincants, les effets spéciaux d’excellente qualité et sobres ; ce qui a a son importance, car récemment la surenchère d’effets, trucages divers aux couleurs psychédéliques, noyaient un peu trop les sujets au lieu de les soutenir.
Dans les choses à éviter, nous sera épargné (et c’est très bien si on prends le temps d’y réfléchir), l’humour potache, les blagues qui sont autant de références à un cinéma, parfois désuet, souvent vieillot. Ici le parti pris est celui de l’univers cohérent (et qui s’inscrit dans une temporalité proche) permettant une immersion assez rapide, et ainsi de prendre du plaisir à sa vision. Alors, certes ce n’est pas un chef-d’œuvre, mais un métrage agréable à regarder, dont les défauts comme des personnages un peu trop 'ciblés' ou certaines séquences trop ‘télescopées’, passent assez bien.
Le spectateur curieux (ou averti) sera par contre étonné de voir que les 'piliers' de l’information cités dans le film sont BFM TV ou CNews… Curieux ici que ce soient justement des chaînes racoleuses - et comment qualifier autrement le principe de l’information en continu - des chaînes donc, qui ont des obligations de résultats, d’audience et de recettes publicitaires, qui sont mises en avant. Est-ce une volonté de dénonciation, ce qui semble habile en ce cas, mais qui dès lors qu’on a ‘utilisé’ les principaux acteurs de ces chaines (les présentateurs), tombera à plat ? Le spectateur jugera par lui même.
Un autre phénomène est cette dimension héroïque - et qu’il faut souligner - qui devient de plus en plus présente sur de nombreuses séries et films, tous pays confondus. Faut-il y voir, alors que le monde va mal - ce qui n’aura échappé à personne - une tentative pour revenir vers des notions plus simples, plus normalisées, loin de ces excès de violence, d’actes gratuits ou d’incivilités diverses ? Une sorte de thérapie alors… pourquoi pas ! Et surtout si la production avait à l’esprit cette envie de montrer, loin de la vision américaine et hollywoodienne, quelque chose qui soit proche de nous, et qui nous renverrait à cette expression européenne, celle du réalisme qui produira un univers cohérent, saupoudré de fantastique qui pour sa part nous offrira alors une métaphore sur l’individu et la perception du monde qui l’entoure.
On soulignera le jeu des principaux acteurs, agréable, sans trop d’effets de caricature même si le ‘méchant’ et ses sbires, n’échappent pas à ce répertoire, à ce catalogue d’outrances dans les actes notamment. Oui, c’est vrai qu’un ‘bon’ méchant, c’est complexe à interpréter et à mettre en scène, c’est peut être là qu’on sera un peu déçu. Mais Comment je suis devenu super-héros est un bon divertissement, à regarder à fortiori parce qu’il n’est pas pensé comme ce qu’auraient pu produire les américains. De là à dire que c’était osé de produire et réaliser un tel métrage, il n’y a qu’un pas, que nous franchirons aisément car la France reste toujours excessivement frileuse quant aux productions à effets spéciaux et aux films de genre.
Comment je suis devenu super-héros
Fiche technique
Réalisation : Douglas Attal
Scénario : Cédric Anger, Douglas Attal, Gérald Bronner, Melisa Godet et Charlotte Sanson, d'après le roman Comment je suis devenu super-héros de Gérald Bronner
Musique : Nino Vella et Adrien Prévost1
Direction artistique : Jean-Philippe Moreaux
Costumes : Maïra Ramedhan Levi
Photographie : Nicolas Loir
Montage : Francis Vesin1
Production : Alain Attal, Marie Jardillier et Emma Javaux
Production associée : Philippe Logie
Production : Trésor Films ; Artémis Productions (coproduction)
Distribution : Netflix (France) ; O'Brother Distribution (Belgique)
Distribution
Pio Marmaï : Gary Moreau
Leïla Bekhti : Callista
Benoît Poelvoorde : Monté Carlo
Vimala Pons : Cécile Schaltzmann
Swann Arlaud : Naja
Clovis Cornillac : Gigaman
Gilles Cohen : le commissaire
Léonie Souchaud : Lili, la fille de Gigaman
Camille Japy : la psychologue
…
Sylvain Ménard, juillet 2021