Se connecter
‘Ça arrive’ de Sabrina Nouchi débarque en novembre sur nos écrans… Attention, c’est un film coup de poing !
18 octobre 2024 à 14h00
C’est une claque !… Un pamphlet contre la ‘connerie’ humaine et sa cohorte de mauvaises actions. Et c’est sans doute un cri du cœur qui devrait - comme un uppercut en plein estomac - vous assommer, et vous mettre au sol ; mais pas dans l’intention de vous écraser de tristesse (même si cette sensation risque d’être là aussi), mais dans celle plus louable de vous aider à vous rendre compte de ce que certains chiffres représentent, loin de n’être que des statistiques, car nous parlons de femmes et d’hommes. Sabrina Nouchi avec ‘Ça arrive’ nous propose une plongée (abyssale ?) dans un commissariat marseillais, au contact de ceux qui souffrent et ont besoin d’aide mais avant tout d’une écoute, et de ceux qui malgré des moyens limités, un travail harassant, puisent en eux suffisamment de force et de courage pour produire ce service qu’on attend d’eux !
Le film signé Sabrina Nouchi est particulièrement dur, et ce dès la première scène qui pose d’emblée la problématique de la déposition, de l’acte, du viol en fait ; et de ce qu’on appelle la ‘catégorisation’ en des termes fort et poignants.
Dans ce simple titre, ‘Ça arrive’, se trouve déjà décrite toute l’ignominie de l’acte, l’horreur de la situation, la perte de son humanité, avec un viol !
Le refus, la dénégation sont souvent présents, dans ce que nous voyons de ce quotidien d’un commissariat à Marseille ; et nous avons l’impression d’avoir comme un poids énorme sur les épaules, à la vision de ces personnes (femmes et hommes) confrontés à la réalité ; confrontés à l’abomination ultime.
Porté par des acteurs justes et dans le ton, le film oscille sans cesse sur la corde raide, et c’est l’émotion qui nous étreint à la vision de ces personnes qui ne sont pas (seulement) des ‘cas’ et qui n’entrent pas dans un tableau statistique ni dans les cases d’un fichier qui circule dans les ministères ; car on parle d’humains, des femmes, des hommes.
Et puis il y a les cas qui relèvent d’une incompréhension, celle d’un moment qui devrait être partagé, et où l’un des partenaires ne suit pas. C’est également là où on commence à prendre la mesure de la complexité des déclarations et de ce qui se passe dans la vie des gens ; et bien évidemment de ce qu’il souhaitent garder secret.
Et toute la force du film vient de cette longue (trop longue) litanie de rapports qui nous émeuvent, de confessions, de confidences ; qui toutes, à un moment où à un autre, soulignent l’humiliation subie, la perte de son identité et de son individualité.
Et la question que se posera, le spectateur et fatalement l’humain qui est en nous, est bien : comment peut-on faire ce métier ? La réponse, aussi surprenante soit-elle, est que dieu merci, il y des gens de bonne volonté, avec assez de force en eux pour écouter, apporter un soutien, tout en gardant suffisamment de recul afin de rester eux mêmes d’une part, ensuite afin de ne pas commettre d’erreurs. Un métier, un sacerdoce presque ? Et tout du moins, une belle leçon d’humilité et de courage, car il en faut et à foison !
Avec un regard par moment très clinique ; dans ces reconstitutions, dans ce quotidien ; Ça arrive’ nous heurte et nous fait mal. Car au delà de l’idée que l’on s’en fait et de ce que représente le viol, le harcèlement, l’atteinte à sa liberté propre ; c’est au travers de la justesse du propos, avec une économie de moyens qui renforce la tension, que le réalisme des scènes et parfois la crudité des mots provoque en nous cette sensation d'abattement.
Enfin, nous sommes touchés, enfin il y a une réaction. Car soyons honnêtes, les viols ne sont que des statistiques pour beaucoup d’entre nous, et avec ce film la réalisatrice Sabrina Nouchi met des visages sur ce qui n’est bien souvent que des mots, et c’est bien naturellement cette ‘matérialisation’, qui nous met mal à l’aise.
Sylvain Ménard, octobre 2024
Synopsis : Dans un commissariat du 1er arrondissement de Marseille, trois enquêteurs, deux hommes et une femme, font face aux récits des viols qui sont perpétrés quotidiennement dans la cité Phocéenne. Chaque jour, ils reçoivent des victimes de tout âge, genre et milieu social. Chaque jour, ils mènent leur professionnalisme au service de cette brigade haute en couleur, ou le drame côtoie l’humour, et la noirceur l’espoir.