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Quand baleines et tortues nous montrent le chemin, une belle composition de Jérôme Lemonnier
17 février 2022 à 17h25
Jérôme Lemonnier après le documentaire Au-delà des cimes sorti en 2009, retrouvait le réalisateur Rémy Tézier en 2018 pour le film, Quand baleines et tortues nous montrent le chemin, qui nous contait les ‘aventures’ d’un jeune baleineau et d’une tortue verte. L’album vient de sortir, l’occasion pour nous de saluer cette initiative du compositeur lui même, et de revenir sur ce score fin et inventif.
Quand baleines et tortues nous montrent le chemin (Original TV Soundtrack), est l’occasion de retrouver Jérôme Lemonnier sur une composition éclairée et sensible, où son écriture nous semblera plus délicate et probablement aussi plus ‘classique’. Ce compositeur que nous avions pu suivre et interviewer, notamment pour son excellent travail sur la série Alex Hugo ; nous propose de le suivre sur ce trop court album, où la beauté visuelle - celle de cette faune si enchanteresse - se devait d’être accompagnée d’un score poétique et lyrique.
Ce que nous avions déjà perçu sur maints des scores que Jérôme Lemonnier a composé, c’était cette part de lumière - curieux pour un homme dont une partie de l’activité se passe à illustrer des œuvres liées au thriller, au film policier ou bien au drame - qui ici prend des atours parfois joyeux et tendre, et à d’autres éthérés, soulignant la candeur et l’innocence de ces créatures.
On notera une dimension musicale qui pour ceux qui fréquentent certains compositeurs modernes, le rapprocherait du minimalisme ou de ce mode répétitif cher à Philip Glass. Les effets que les cordes amplifient, le toucher du piano ; tout cela nous renvoie de fait à cette école, à cette musicalité précise, et à ces esquisses qui accompagnent les images, mais jamais ne les surchargent. Oscillant entre ces instants délicats et ces phrases plus riches, Jérôme Lemonnier s’inscrit ici dans un schéma que l’on pourrait qualifier d’ouvertement contemplatif, et indéniablement moderne.
Si à certains moments nous avons comme l’impression de nous retrouver en compagnie de compositeurs classiques modernes, on pourrait citer Satie, c’est bien par le truchement du piano et de son toucher délicat comme évoqué précédemment que s’opère cette ‘reconnaissance’, cette sensation renforcée à l’aulne de l’écoute d’un morceau comme « La paix du récif » au rythme et à la langueur si particulière. La délicatesse de ces instants, trouvent alors son corollaire dans des évocations proches d’une expression que l’on trouve dans des petits ensembles de musique, voire d’orchestres de chambre. Un mode où la simplicité et une forme directe doivent immédiatement toucher le spectateur et auditeur !
Soyons bien clair, lorsque nous évoquons la musique minimaliste, il ne s’agit pas de souligner une forme de facilité ou un moyen d’expression limité, tout au contraire, nous avons à l’esprit des Philip Glass, des Michael Nyman, des Max Richter. Il doit être évident aux oreilles de l’auditeur, qu’écrire et orchestrer des passages qui doivent résumer une pensée ou une sensation - comme le nostalgique « Le grand départ » nous le fait découvrir - n’est pas tache aisée, bien au contraire. Les tempis et l’usage des instruments sont des paramètres (si l’on ose ce mot barbare), extrêmement précis dans leur usage, un débordement, une note de trop gâcherait tout le plaisir !
C’est de la sorte une histoire d’équilibre, entre les images qui sont notre premier contact avec l’œuvre cinématographique et une bande originale qui se doit de rester sobre, parce que le sujet l’impose, et que de cette sobriété nait la beauté.
Une œuvre à découvrir, l’album est sorti ce mois de février… Nous n’omettrons pas de rappeler que Jérôme Lemonnier avait sorti en 2020 Musiques de Scène (Originals Theater Soundtracks) qui à l’époque déjà nous avait interpellé, tant l’homme nous semblait à l’aise dans de multiples genres, s’immergeant avec facilité dans des mouvements romantiques, modernes, théâtraux (ce qui ici relève de l’évidence), ou encore drôles ou caricaturaux, loin de certaines images véhiculées par la télévision notamment. Cette digression terminée, il nous apparaît extrêmement prometteur d’entendre cette composition sur le documentaire Quand baleines et tortues nous montrent le chemin, un bel exemple de créativité et de renouvellement, un bel exemple de ce qu'un compositeur inspiré sait faire - et serai amené à faire dans le futur !
Quand baleines et tortues nous montrent le chemin
01. Naissance de Ti Bouchon 4:22
02. Petite Cabosse 6:31
03. L'apprentissage de Ti Bouchon 2:41
04. La paix du récif 2:12
05. L'observatoire de Kélonia 1:55
06. Rencontre avec les plongeurs 1:52
07. Comme un retour à l'enfance 3:03
08. Danseuse étoile 3:20
09. Le grand départ 1:18
10. Quand baleines et tortues nous montrent le chemin 2:06
Sylvain Ménard, février 2022