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Marianne, la série d’horreur française.
23 septembre 2019 à 14h30
Initiative attendue depuis longtemps, surtout en regard des productions américaines, anglaises ou asiatiques omniprésentes, « la série d’horreur française » vient d'arriver et elle est produite dans l’hexagone. Diffusée sur Netflix, Marianne bénéficie d’une visibilité certaine, proposant une histoire que nos producteurs et réalisateurs peinent à envisager comme étant potentiellement rentable la plupart du temps, que ce soit sur grand écran comme pour la petite lucarne !
Emma Larsimon est un auteur d’horreur à succès et tandis qu’elle est en pleine promotion du dernier tome de sa saga « Marianne », surgit une amie d’enfance qui l’avertit d’un danger imminent. Des cauchemars qui l’assaillaient plus jeunes reviennent alors, tandis que son amie d’enfance se suicide sous ses yeux. Retournant alors, accompagnée d’une assistante, dans son village natal, elle va mener une enquête de plus en plus marquée par le paranormal et l’horreur, retrouvant dans le même temps ses autres amis d’enfance.
Le format assez court, sur huit épisodes et durant entre 35 et 50 minutes, a le mérite d’offrir une mise en scène condensée et au rythme rapide. L’histoire se laisse regarder, alternant les scènes d’angoisse et les autres descriptives, avec leur lot (peut être excessif) de comportements troublants ou déviants, soulignant l’anormalité ou l’étrangeté. Se dégage de cette histoire un petit côté Club des Cinq, notamment les scènes de flash-back avec les membres du petit groupe, et qui nous ramène à des schémas connus. Une certaine nostalgie, liée au temps qui passe ou aux amis que l’on a laissé derrière soi, nous saisit et renforce ce côté agréable à la vision de la série.
Mais voilà elle soulève également un certain nombre de problèmes. Autant elle est scénaristiquement intéressante et assez novatrice - du moins dans notre pays - d’abord parce qu’un tel sujet n’a pas été traité et encore moins dans ce format télévisuel précis, ensuite parce que l’approche et les moyens sont plutôt rarement employés à de telles fins ; autant elle manque de relief et d’envergure.
Si le cadre est assez bien exploité, les décors naturels et les lieux de tournages divers notamment, on ne peut s’empêcher de trouver l’action trop recentrée sur les personnages importants, car hormis la fameuse bande, une fois arrivé dans le village d’enfance de l’héroïne, les interactions avec les habitants sont réduits à leur plus simple expression, comme s’ils n’existaient pas.
Le plus gros soucis réside aussi dans le choix des acteurs. Attention, ils ne sont pas mauvais, mais c’est plus en terme de casting que les doutes sont soulevés - qui prendre, comment faire « naturel » et proche de monsieur et madame tout le monde (personnages donc auxquels nous pouvons nous assimiler facilement) - surtout quand on sait à quel point l’empathie pour un personnage est primordiale ! C’est à ce sujet que nous émettons des réserves.
Les motivations du personnage central, Emma Larsimon (interprété par Victoire Du Bois), sont souvent trop incompréhensibles et floues, même si nombre d’explications sont fournies à la fin. Et le jeu de l’actrice ; qui accentue le caractère de son personnage qui est égoïste et excessif ; ne le rend pas plus facilement acceptable. De là à dire que sa présence à l’écran souffre de ces choix scénaristiques et diminue l’empathie que l’on pourrait ressentir, il n’y a qu’un pas. À l’opposé le personnage que joue Mireille Herbstmeyer (Madame Daugeron), est incroyable et dérangeant. Elle impose une puissance de jeu digne d’une production anglo-saxonne, et c’est bien là que la comparaison ne joue pas en la faveur du jeu de Victoire Du Bois, trop guindé, trop figé aussi.
S’ajoutera une fin ouverte, qui n’est pas sans rappeler d’autres fins (de The Reaping (Les Châtiments) à Rosemary's Baby), ce qui nous amène à la question relative à l’inévitable (ou pas ?) suite envisagée !
On pourra également ramener les péripéties - en regard notamment de ce que nous évoquions sous le nom de Club des Cinq - à une décalque de « Ça » de Stephen King, tant il est devenu compliqué d’installer une histoire originale s’accrochant à des personnages qui auront vécu quelque chose dans leur passé (alors qu’ils formaient un groupe soudé) et qui se retrouveront quinze ans plus tard ! Et de fait à l’heure ou Stephen King n’a jamais été autant adapté - entre la sortie du second volet de Ça en septembre et l’arrivée d’un film pour Netflix, IN THE TALL GRASS, en octobre et réalisé par le talentueux Vincenzo Natali - il est compliqué de ne pas faire cette comparaison !
Crédits :
Marianne (genre : Horreur)
Création : Samuel Bodin
Production : Raphaël Rocher et Lionel Uzan
Acteurs : Victoire Du Bois, Lucie Boujenah, Tiphaine Daviot, Ralph Amoussou, Bellamine Abdelmalek, Mehdi Meskar, Alban Lenoir, Mireille Herbstmeyer, Corinne Valancogne, Patrick d'Assumçao, Pierre Aussedat, Bruni Makaya, Luna Lou, Adam Amara, Charlie Loiselier, Anna Lemarchand, Aude Gogny-Goubert.
Musique : Thomas Cappeau
Diffusée sur Netflix
Format : 8 épisodes entre 35 et 50 minutes.
Sylvain Ménard, septembre 2019