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Si on s’attardera sur la qualité de jeu des acteurs, sur la beauté des costumes et la luxuriance des décors où à contrario la fascination qu’ils provoquent en nous tant ils semblent menaçants ou froids ; c’est sur un casting presque (ça ne l’est jamais tout à fait) parfait, que nous serons à même de percevoir le souci et l’envie de créer une série inoubliable. Des personnages attendus, à ceux qui se révèlent à nous créant une intéressante déclinaison, nous avons le privilège de rencontrer certains que nous connaissions au travers des deux trilogies, bien plus jeunes, et presque plus intéressants.
Fidèle à l’œuvre de Tolkien, mais en sus, faisant preuve d’originalité - tout comme avec un certain elfe sylvestre - la production ne démérite pas, et nous assène autant de moments incroyables, que de visions superbes. Alors soyons clairs, l’œuvre est librement adapté ; mais surtout elle revendique fort intelligemment son rattachement aux ‘Appendices’, ce qui lui permet d’élargir l’horizon des lieux et l’éventail des personnages, tout en ayant une certaine latitude en terme de création ou d’interprétation. Aussi que de qualificatifs, mais également que de reconnaissance à une production qui a pris la mesure de l’enjeu et par le biais de ces plans travaillés et ciselés quasiment à la perfection - tels de petites peintures ou des miniatures - nous comble de bonheur.
Est-ce totalement fidèle, j’en viens à douter qu’une personne (une seule ?) soit capable de revendiquer cette capacité à juger… Et est-ce totalement lié à l’univers de Tolkien ; la réponse est indéniablement, oui !
On ajoutera que la série tournée en Nouvelle Zélande, permet une identification immédiate avec les chefs-d’œuvres de Peter Jackson, et ajoute d’autant à notre plaisir visuel et cinéphilique, tout en amenant dès les premiers épisodes une réelle authenticité et originalité à sa mise en image. Sans être servile dans son rapport aux lieux et personnages connus (Galadriel ou Elrond en étant un excellent exemple), la série est autonome, s’affranchissant - ce qui est normal, puisque tout se déroule avant - des trilogies et apportant sa pierre à l’édifice. On attendra bien sûr la fin de cette première saison pour se faire une idée définitive, mais le pari semble d’ores et déjà gagné, c’est une bien belle réussite.
Et nous pouvons anticiper sur le fait que la barre vient d’être mise très haute, et que scénaristiquement et visuellement, Le Seigneur des anneaux : Les Anneaux de pouvoir, vient de laisser derrière elle bon nombre de prétendants, et de productions y compris cinématographiques !
Nous n’oublierons pas de mentionner la composition démesurée, aux chœurs resplendissants et aux harmoniques superbes, de Bear McCreary, composition à laquelle nous avons déjà consacré un article.
Industrial Light & Magic et Weta Worshop se partagent le travail sur le show, signe que la série a su se développer autour d’artisans originaux et doués.
La production verra officier à la direction artistique, Ramsey Avery et Rick Heinrichs (collaborateur de Tim Burton), les costumes étant conçus par Kate Hawley, connue pour ses participations sur Mortal Engines, la trilogie du Hobbit, ou encore Crimson Peak, Pacific Rim, Edge of Tomorrow. Jamie Wilson supervise la production des prothèses, nombreuses sur une série de ce type ; et c’est aussi l’occasion de retrouver chez Weta, le talentueux Richard Taylor aux prothèses, armures et armes diverses, lié à nouveau à cet univers fantastique, un autre gage de qualité soulignons-le.
Le générique de fin est à ce titre incroyablement long, si long qu’il en devient digne d’un film d’ampleur, d’une superproduction, et d’ampleur cette série n’en manque pas.
Pour conclure cet article, un terme me vient à l’esprit - terme il me semble rarement employé - concernant la série produite par Amazon : une série de prestige ! Car c’est là - et ne nous y trompons pas, que les cartes sont rebattues, puisque depuis quelques temps déjà et avec l’émergence de séries particulièrement réussies et au succès incontestable ; se posait la question des succès de cinéma et la mise en chantier d’œuvres parfois réellement bonnes, d’autres fois peu satisfaisantes… Ici Amazon a non seulement disqualifié toute concurrence pour quelque temps, mais se hausse à un niveau de qualité supérieure à mainte réalisations cinématographiques. Et ceci, vous l’avouerez, pose un réel problème quant au devenir de certaines productions.
Sylvain Ménard, septembre 2022