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Le film miédiéval-fantastique de Paul Urkijo Alijo, ‘IRATI’, nous invite à une poétique et mystérieuse plongée dans la mythologie basque
29 juin 2024 à 21h00
Incursion particulièrement réussie dans un monde d’une poésie et d’une maturité incontestable ; le film de Paul Urkijo Alijo, "IRATI", nous impressionne par la beauté de ses images et de sa mise en scène, mais surtout tout du long de ses presque deux heures parvient à ne pas nous lâcher un seul instant.
Si aux yeux de certains les légendes basques semblent trouver un écho dans la geste Arthurienne avec la Dame du Lac, et la magie liée à cette époque où le monde s’affranchit de certaines traditions, embrasse le christianisme et renvoie toute autre croyance dans les limbes de la mémoire et des légendes ; IRATI nous offre une version superbe et colorée de récits qui sont tout autant historiques que légendaires.
Ainsi se partageant entre film médiéval et film fantastique peuplé de créatures et d’antiques divinités, IRATI nous offre cette Immersion au sein d’une mythologie basque - que nous avouerons peu connaitre - où la poésie des images sublime le quotidien de ces gens dans cette époque reculée.
Cette vision d’un géant se révélant dans une forêt somptueuse irisée d’une lumière mordorée vaut à elle seule le détour, mais que dire de celle de l’entité finalement bienfaisante qui sans être totalement dévoilée prend ici une importance primordiale, comme une déesse semblable à Gaïa !
Autant d’indications finalement qui nous porteront à voir en IRATI une ode au monde et à la nature, à la vie. Sans être ce qu’on pourrait nommer un film ‘écologiste’, ce qui nuirait sans doute au propos, IRATI pose des jalons et nous met au pied du mur en nous invitant à reconsidérer notre relation à la nature.
Belle fable ; dont certaines scènes oniriques ou fantastiques renverraient à celles d’un de nos cinéastes parmi les plus marquants, j’ai nommé Jean Cocteau ; le film de Paul Urkijo Alijo nous emporte très loin avec lui dans une histoire où la beauté des images côtoie un message d’amour et de tolérance… Un message tempéré par une réflexion sur la foi (quelle qu’en soit la nature) et notre place en son sein.
Si le terme ‘médiéval fantastique’ peut sembler quelque peu barbare, voire énigmatique, il se réfère de fait à deux genres : le film médiéval, qui est souvent de nature historique et - dans la mesure du possible - se base sur des faits existants ; et le film fantastique qui dans un contexte ou un autre amènera cette dimension spécifique, et qui, par nature, repose sur des conjonctures, spéculations et récits ou légendes dans le cas présent.
Or si la littérature n’a pas été avare de titres qui puisaient dans les deux genres, étudiant presque cliniquement l’histoire, tout en l’agrémentant d’éléments fantastiques ; loin s’en faut du cinéma. Peu nombreuses sont les réalisations qui empruntent à l’histoire et au fantastique. Faisons immédiatement abstraction des grands classiques de l’Héroïc Fantasy qui ne relèvent pas de l’histoire. Aussi tournons-nous vers les rares exemples qui nous viennent à l’esprit.
Excalibur de John Boorman, s’appuie sur la légende d’Arthur, et en partie sur des textes tirées de chroniques. Dragonslayer (Le Dragon du Lac De Feu) de Matthew Robbins s’appuie curieusement sur une étude plutôt précise de la vie à l’époque dans une contrée où la menace d’un dragon pèse sur l’existence des villageois. Le dragon occupant que peu d’espace dans l’histoire (même s’il reste une des plus belles créations du cinéma de genre), nous le classons bien dans le médiéval-fantastique ! De même le film Lady Hawke de Richard Donner s’apparente t-il au genre, une histoire classique, quelques monstres et un réalisme certain dans la réalisation.
Ces titres peuvent sembler de prime abord exclusivement fantastique, mais c’est bien cette partie qu’on nommera l’étude (la rudesse et la complexité de la vie de l’époque) puis l’ajout de légendes, qui pour certaines perdurent au travers des contes de différents pays aujourd’hui, qui en font des représentants de ce sous-genre.
Envoûtant et éloquent, le film est une œuvre à part, un mélange de genres au service d’une histoire qui ne pourra que nous toucher, et surtout un film éblouissant à voir absolument ; travail d’un jeune réalisateur dont c’est seulement là le second long-métrage.
Synopsis : Au VIIIe siècle, un groupe de guerriers chrétiens et musulmans erre dans les Pyrénées païennes dans l’espoir de trouver le trésor de Charlemagne dans une grotte. Selon les habitants, une puissante déesse y habite : Mari. Un jeune noble nommé Eneko entre dans les forêts des Pyrénées, à la recherche du corps de son père. Eneko aura l’aide d’une mystérieuse fille nommée Irati dans ses aventures à travers un monde mythologique aussi magique que captivant.
Sylvain Ménard, juillet 2024
Casting :
Eneko Sagardoy, Itziar Ituño, Edurne Azkarate ;
Sortie Pays Basque: 22 Mai 2024 ;
Sortie France : 26 Juin 2024 ;Technique :
Réalisation : Paul Urkijo Alijo
Production par : Bainet Films, Ikusgarri Films, Kilima Media, La Fidèle Production.