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John Williams : Concerto pour violon n°2 & pièces diverses
14 juin 2022 à 07h00
John Williams est de retour dans l'univers classique avec un très beau concerto pour violon, composé pour Anne-Sophie Mutter, la grande violoniste allemande.
Le grand John Williams nous offre ce Concerto pour Violon n°2, après celui paru dans les années quatre vingt. A l'époque ce premier concerto pour violon, qu’il avait écrit vers le milieu des années soixante-dix, ne fut joué qu’en 1981 (avec le Saint Louis Symphony Orchestra dirigé par Leonard Slatkin). Cette œuvre connût par la suite une révision en 1998, l’œuvre étant dirigée pour la première par le Maestro lui même. Ce concerto se présentait alors sous la forme de trois morceaux : Moderato, Adagio, en contemplation paisible et enfin Maestoso, presto.
Pour ce second Concerto pour violon qu’il a écrit à l’intention de Anne-Sophie Mutter, artiste avec laquelle il a déjà travaillé, la forme varie et se trouve enrichie d’un quatrième mouvement, les morceaux étant de la sorte nommés ; Prologue, Rounds, Dactyls et Epilogue.
Entre lyrisme et belle écriture énergique qu’appuient ces orchestrations chères à John williams, cette partition se fait plus moderne et par moment abstraite, comme s’il y avait eu la mise en place d’un raccourci vers un public plus classique et moins cinéphile, ce qui pourrait gêner certains auditeurs. Mais rassurez-vous, son inspiration est bien là, et se veut justement en adéquation avec son goût pour la grande musique, classique par excellence, et trouve son corollaire dans le travail qu’il a fourni tout du long de ces décennies. S’il emprunte ici des chemins moins connotés ‘musique de film’, même si ce terme semble quelque peu exagéré au regard de ses innombrables compositions ayant fait appel à de grands ensembles, son Concerto pour Violon n°2 est une œuvre aboutie, riche et dense (si ce n’est foisonnante) que l’auditeur prendra plaisir à découvrir.
Prologue est un morceau virtuose, classique et pourtant moderne, piquant et dynamique. Rounds est un mouvement plus calme mais vif dans le jeu des cordes et qui vers la fin s’accélèrera quelque peu. Tout ramène alors à des accords presque cinématographiques, dans cette accélération finale. Dactyls offre de nombreuses attaques, soutenues par des percussions, et met en valeur le violon dans un mouvement vif qui le rapprocherait par moment, dans ses accentuations et sa rugosité, d'une valse. Le dernier mouvement, Epilogue, est lent et romantique, reprenant le motif entendu sur Rounds, nous amenant à cette conclusion douce.
Avec cette nouvelle composition, l’album propose trois ‘relectures’, car arrangées et orchestrées différemment ; du thème du film The Long Goodbye, du thème de "Han Solo and the Princess" de The Empire Strikes Back et du thème de "Marion" de Raiders Of The Lost Ark.
Le motif du film Le Privé composé par John Williams en 1973, prend ici des allures plus sombres et propices à l’introspection, loin du caractère jazz et très années soixante-dix de l’original. Ce sera le cas également bien évidemment du plus romantique des morceaux composés pour la saga Star Wars, le thème de Han Solo et de la Princesse, à qui profite on s’en doute le jeu tout en finesse de Anne-Sophie Mutter ! Le dernier morceau étant celui du thème bien connu des cinéphiles, l’emblématique motif lié à Marion dans Les Aventuriers de l'arche perdue. Ici nous sommes dans une approche où la forme que prend l’interprétation est plus voluptueuse, plus romantique - certains diront, ‘triste’ - mais qui n’est finalement que le reflet du sentiment exprimé et de sa profondeur.
Un bel album, où John Williams nous convainc encore du fait qu’il demeure bien loin devant nombre d’autres compositeurs, réussissant à nous étonner et à produire une œuvre d’une belle écriture, où l’on prend plaisir à retrouver ses orchestrations étincelantes, les accords si reconnaissables des cordes et des cuivres, et cette poésie immédiatement accessible.
N’oublions pas que John Williams a énormément composé de musiques ‘dites’ classiques ; mais ceci étant dit nombres d’œuvres sont introuvables, ayant été jouées, mais rarement éditées (ce qui reste le fond du problème) en admettant qu’elle aient été enregistrées.
On y inclura sa Symphonie n° 1, composée en 1966 et retravaillée en 1988.
Il aura composé en tout premier son Concerto pour flûte et orchestre en 1969. Comme évoqué au début, son Concerto pour violon et orchestre n°1 date de 1976 ; il sera suivi (entre autres) de : Concerto pour tuba et orchestre en 1985, d’un Concerto pour clarinette et orchestre en 1991, d’un ensemble de trois pièces pour violon et orchestre en 1993 (tirées de La Liste de Schindler), d’un Concerto pour basson et orchestre « The Five Sacred Trees », créé par Judith LeClair en 1995, d’une suite en six mouvements pour orchestre intitulée « American Journey » en 1999, d’un Concerto pour violon et orchestre - intitulé « Treesong » - en 2000, d’un Essay for Strings en 2002, d’un Concerto pour cor et orchestre en 2003, d’un Concerto pour alto et orchestre en 2007, d’un Concerto pour harpe et orchestre en 2009, d’un Concerto pour hautbois et orchestre en 2011, d’un concerto pour violon intitulé « Markings » (créé par Anne-Sophie Mutter) en 2017…
Certaines de ses compositions créées à l’occasion d’évènements spécifiques sont particulièrement jubilatoires, comme son Soundings (inauguration du Walt Disney Concert Hall) en 2003, ou son court Summon the Heroes (Jeux de la XXVIème olympiade à Atlanta) en 1996 !
[les six mouvement de « American Journey », sont : Immigration and Building, The Country at War, Popular Entertainment, Arts and Sports, Civil Rights and the Women's Movement, Flight and Technology]
Violin Concerto No. 2 & Selected Film Themes
Label : Deutsche Grammophon
01. I. Prologue
02. II. Rounds
03. III. Dactyls
04. IV. Epilogue
05. Theme The Long Goodbye)
06. Han Solo and the Princess (The Empire Strikes Back)
07. Marion's Theme (Raiders Of The Lost Ark)
Sylvain Ménard, juin 2022