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DRACULA : La mini série de la BBC sur NETFLIX
13 janvier 2020 à 11h00
Produite par la BBC et diffusée sur Netflix, Dracula est une mini série de trois épisodes d’une heure trente chacun. Basée sur le roman éponyme de Bram Stoker, la série s’avère plutôt convaincante et adapte avec une certaine intelligence l’histoire originale, sans tomber dans la trop grande facilité… Malgré quelques écueils - et c’est difficile de les éviter quand on connait la propension des séries produites par la BBC à s’inscrire dans le contexte moderne et social - Dracula est une réussite même si on aurait souhaité un traitement différent pour le troisième segment.
Premier chapitre : Les Règles de la bête (The Rules of the Beast)
Particulièrement respectueuse de l’iconographie classique - on parle ici des films de la Hammer notamment - et surtout du personnage interprété par Christopher Lee dans le rôle titre ; on ne peut que souligner le jeu de Claes Bang au travers d’une mise en scène efficace et gothique à souhait. Si le Jonathan Harker de cette version n’arrive pas à nous effacer de la mémoire celui de Coppola, il s’inscrit dans un registre totalement nouveau et ma foi suffisamment original (et dramatique) pour nous interpeller ! Mais c’est le personnage de sœur Agatha Van Helsing, qu’interprète Dolly Wells, qui nous marquera le plus. S’éloignant de la trame du film de Coppola (et c’est tant mieux), ce Dracula-ci s’oriente vers une horreur plus pure au sens strict, Dracula n’est-il pas un prédateur ? Baigné de tons ocres et parfois très sombre, à d’autres moments les décors de certaines scènes étant soulignés par des tons bleus extrêmement froids ; la photographie nous régale et nous permet cette immersion au sein de l’histoire. Bien que plus violent que d’autres adaptations (éventrations, égorgements ou décapitations sont au menu du jour), la part belle est laissée à cette interprétation où l’on joue avec nous, soulignant les non-dits, laissant planer des doutes, flirtant avec le drame, le suspense ou l’horreur. La musique signée de David Arnold et Michael Price est sombre et également gothique, rendant un hommage appuyé à ces classiques incontournables.
Second chapitre : Vaisseau sanguin (Blood Vessel)
Se déroulant sur le Demeter, le navire qui doit permettre au Comte Dracula de se rendre en Angleterre, ce second chapitre demeure dans cette évocation historique et somme toute classique que nous connaissons (à nouveau la Hammer ou le film de Coppola). La tonalité globale change alors, les tons sont plus froids et dans le même temps avec plus de marrons, d’ors et de gris. Mais la grande différence réside dans la façon d’aborder alors les personnages, car entre le jeune marié (marié par convenance car il est homosexuel), la vieille duchesse, le docteur indien qui a vu des choses qu’il n’aurait pas du voir et un équipage autant pétris de craintes réelles que de superstitions, nous ne tardons pas à assister à la déchéance de chacun, confrontés à leurs secrets avouables ou non. Dracula fait presque figure de saint alors qu’il est plongé dans cet échantillon d’humanité finalement trouble et volontairement trompeur, et où sa nature de prédateur et son appétit de sang font également de lui une victime, car il n’est que ce qu’il est : un vampire qui ne peut combattre sa nature. Nous remarquerons que la dimension « maladie du sang » est nettement plus présente dans ce chapitre, de même que les scènes de simulation de sexe comme la scène avec le jeune marin qui croit voir la jeune mariée alors que c’est Dracula qui abuse de ses sens (et le dévorera).
Nous observons alors au travers des yeux de Dracula cette progression dans la déchéance et une horreur plus graphique, la quasi totalité des personnes présentes sur le navire décédant affreusement. La conclusion de cette partie charnière verra Dracula obligé de se réfugier dans un cercueil qui sombrera au fond la mer tandis que le navire est coulé au large des côtes anglaises… La suite verra Dracula sortir de l’eau… arriver sur une berge et être entouré de soldats avant d’être survolé par un hélicoptère !
Troisième chapitre : Sombre boussole (The Dark Compass)
C’est sans doute avec cette décision de faire se dérouler l’action de nos jours que finalement on va se perdre un peu dans des digressions inutiles. Si nous sommes plutôt habitués à ce genre de choses, c’est bien justement parce que c’est monnaie courante dans les développements de séries de la BBC, comme sur tant de créations à l'instar de Docteur Who (et son pendant Torchwood assez caricatural et outrancier), Sherlock ou bien encore la dernière mouture de La Guerre des Mondes ! Cette marque de fabrique qui est de cibler un public élargi ; n’hésitant pas à montrer des scènes de sexes (hétérosexuelles ou homosexuelles), sans oublier des personnages perdus et volontairement exagérés ; trouve ici un pendant logique, car après tout Dracula visera souvent les plus faibles et les plus désespérés. Mais voilà nous sommes dans le même temps déçu tant les péripéties trouvant un écho dans l’Angleterre Victorienne auraient été bien mieux que ces plans (aussi efficaces soient-ils) situés dans le Londres moderne. Bien sûr nous pouvons respecter ce choix, mais la base classique existe. Autant faire évoluer des vampires aujourd’hui a su trouver un écho favorable avec des films comme Underworld, ou Vampires de Carpenter notamment ; autant là nous sommes face à une déclinaison (devons-nous dire une adaptation ?) de l’œuvre de Stoker qui avait commencé superbement et qui voit son dernier tiers déboucher sur un thriller ou une course-poursuite ! Car c’est là qu’il y a un soucis car le dernier quart d’heure fait montre d’une telle intelligence dans le développement du scénario, ramenant certains personnages, jouant avec certaines de nos peurs (le cancer pour ne pas le nommer), ou restructurant les fameuses règles du vampirisme, que tout va s’imbriquer jusqu’à un dénouement final auquel nous ne nous attendions pas. Cette fin - qui explique que cette mini série reste une réussite - nous fait encore plus regretter le traitement de cette dernière partie ; qui - soulignons-le - l’aurait sinon rendu excellente !
Un mot sur le casting très réussi et surtout une mention spéciale à Claes « Dracula » Bang ainsi qu’à Dolly Wells pour son double rôle. On pourra regretter (il ne faut pas tout révéler) le manque de présence et de développement du personnage de Mina Harker, tandis que Van Helsing devient un personnage prépondérant dans la série.
Pour tout ceux que la technique, le « comment fait-on », intéresse, voici un lien fort bien fait ; une sorte de petit making-of de Dracula… Making-Of Dracula
Crédits :
Dracula
Crée par Steven Moffat et Mark Gatiss
Réalisé par Jonny Campbell (1er épisode), Damon Thomas (2e épisode) et Paul McGuigan (3e épisode)
Musique : David Arnold et Michael Price
Décors : Laura Mayall et Arwel Wyn Jones
Costumes : Sarah Arthur
Photographie : Tony Slater Ling
Montage : Tom Hemmings
Productit par Mark Gatiss et Steven Moffat
Production : Spectral / Hartswood Films / BBC / Netflix
Casting :
Claes Bang : Comte Dracula
Dolly Wells : Sœur Agatha Van Helsing (Dr Zoe Van Helsing)
John Heffernan : Jonathan Harker
Morfydd Clark : Mina
Joanna Scanlan : Mère Supérieure
Lujza Richter : Elena
Johnathan Aris : Capitaine Sokolov
Sacha Dhawan : Dr Sharma
Nathan Stewart-Jarrett : Adisa
Clive Russell : Valentin
Catherine Schell : Duchesse Valeria
Patrick Walshe McBride : Lord Ruthven
Youssef Kerkour : Olgaren
Natasha Radski : Mère
Lydia West : Lucy Westenra
Matthew Beard : Jack Seward
Mark Gatiss : Frank
Tim Ingall : Krasnaya Rubashka
Chanel Cresswell : Kathleen
Lyndsey Marshal : Bloxham
Paul Brennen : Commandant Irving
John McCrea : Zev
Sarah Niles : Meg
Phil Dunster : Quincey Morris
Sylvain Ménard, janvier 2020