Se connecter
"La Théorie du Boxeur", une nécessaire réflexion sur le monde agricole, sort sur les écrans le 27 mars
24 mars 2024 à 18h00
« La Théorie du Boxeur, l’agriculture face au défi climatique » nous décrit avec acuité, l’accumulation des phénomènes auxquels le monde agricole doit faire face et qui peuvent le mener au ‘KO’.
La théorie du boxeur, c’est en l’expliquant simplement, le moment où à force de prendre des coups, ce dernier ne peut plus encaisser et n’arrive plus à se remettre d’aplomb suffisamment vite.
Par extension, ceci s’applique à de nombreuses espèces végétales dont la capacité intrinsèque à s’adapter ou à résister, se trouve réduite par les répétitions d’épisodes climatiques violents et trop rapprochés et qui leur font alors perdre leur résilience.
En substance, telle est l’approche du documentaire, qui nous invite à nous pencher sur les faits (le dérèglement climatique, des politiques agricoles obsolètes…) et d’autre part les ‘remèdes’ mis en place depuis souvent bien longtemps (l’histoire n’est pas avare d’exemples), qui ont fonctionné, peuvent toujours fonctionner ; mais qui à l’heure d’aujourd’hui sont curieusement moins mis en valeur et écarté au profit de l’utilisation de ‘ressources’ extérieures.
En devenant plus autonomes, les exploitants, agriculteurs, éleveurs, peuvent arriver en s’engageant sur les circuits courts, à résister tout en se diversifiant et en économisant sur ce qu’ils trouveront à porté de main, en produisant l’alimentation de leur bétail, et par là même en exploitant les ressources qui existent à proximité.
De même la ‘transformation’ est très importante. Transformer les fruits abimés ou ne relevant pas des normes en terme de calibres (et oui !?) - en mettant en place des ateliers qui vont permettre de cuire, de stériliser ou de mettre en conserves - est autant nécessaire, que finalement logique, dans cet environnement actuel, ne serait-ce qu’en regard des normes trop lourdes édictées par Bruxelles, « norme de commercialisation spécifique, maturité suffisante, coloration, qualité homogène… » (tiré du Journal officiel de l'Union européenne).
Comment reprendre alors la main sur un système lourd et trop ‘politique’, afin de faire face aux incidents climatiques, aux aléas qui frappent de plus en plus ; mais également comment savoir s’adapter, se diversifier afin de ne pas tout perdre si le pire arrive ? En mettant en commun des ressources !? On parle finalement de résilience, et il faut anticiper les problèmes, changer d’optique en tenant compte de paramètres nouveaux.
Autant de questions, autant de problématiques soulevées auxquelles il faudra répondre demain.
Une réflexion voit le jour également concernant les nombreuses incitations à diminuer, voire arrêter d’élever et manger du bétail. Mais de façon rationnelle, on parle évidement d’arrêter la surconsommation, de produire et d’élever durablement, tout en continuant - parce que nous en avons besoin - de manger de la viande.
Il y a un juste milieu au travers duquel nous réussirons à nous affranchir de certains réflexes : mieux consommer, mieux cultiver, mieux élever et abattre du bétail. Toutes considérations finalement, qui nous paraissent tellement logiques !
Le problème de l’eau se pose d’une façon particulière. On sait que sans eau, il n’y a pas de cultures, pas de vie. Et une pensé nous vient quand on constate les incessantes inondations à certains endroits, alors que dans d’autres les sècheresses perdurent, l’irrigation peinant à être faite ! Alors où réside le problème ?… C’est une vraie question qui remet en question la mutualisation des ressources, car Il y a de l’eau. Mais trop à certains endroits, pas assez à d’autres, et donc comment gérer ces demandes entre trop plein et aridité ? Autant de questions que le réalisateur soulève, autant de sujets qui méritent réponse.
Très bien fait, le documentaire brosse le portrait d’un monde rural qui mute, comme il sait le faire depuis des siècles, se diversifiant tout en cherchant de nouveaux modes de distribution, se remettant en question au travers de son modèle économique et environnemental. Même s’il n’apporte pas toutes les réponses (ce qui serait somme toute assez inconcevable), le film de Nathanaël Coste offre la parole aux principaux intéressés, des femmes et des hommes investis et conscients des enjeux, et rien qu’en cela il mérite toute notre attention.
Synopsis : Les excès du climat frappent de plus en plus durement le monde agricole. En 2022, la sécheresse crée un véritable électrochoc dans la vallée de la Drôme. Nathanaël Coste, géographe de formation, enquête chez des agriculteurs bio et conventionnels pour qui le temps de l'adaptation a déjà commencé. Sur le terrain, les approches diffèrent, qu'elles reposent sur les technologies, les stockages d'eau, la gestion des sols ou l'agro-écologie. Alors que la moitié des fermes va changer de main d'ici dix ans, le film questionne agriculteurs et chercheurs, sans à priori, pour repenser notre façon de produire et construire la résilience alimentaire d'un territoire.
La Théorie du Boxeur sort sur les écrans le 27 mars
Sylvain Ménard, mars 2024