Se connecter
GEN V, la série diffusée sur Amazon, une plateforme tout public rappelons-le, soulève nombre de questions. Mais jusqu'où ira t-on dans l’excès et la provocation ?

13 octobre 2023 - 23:00
Si on allume sa télé et qu’on va sur Amazon, on sera surpris de constater la présence de séries destinées à des publics avertis (et adultes).
Peut-on dès lors parler d’excès et de non respect du public (ou en lien avec la norme) que l’on constate sur certains programmes ? Quand des réalisateurs aux producteurs - sans oublier des acteurs qui interprètent ces rôles - tout un ensemble se met au service d’une série qu’on aurait certainement pas envisagé de pouvoir visionner sur une fréquence en accès direct ; se pose la question de la diffusion pour des plateformes comme Amazon. Est-ce que parler d’aberration est exagéré ?
C’est la déshérence d’un système - d’une société, ou d’une civilisation si on va par là - où tout se mélange, tout se réorganise selon des termes et des standards revisités.
L’imagerie à laquelle renvoie une scène d’anthologie (!) d’une jeune fille (douée de super pouvoirs) chevauchant son partenaire d’un soir, est presque nauséeuse, parce qu’elle est sortie de son contexte, celui d’une histoire racontée normalement à l’aide d’idées et de concepts. Rajouter de vraies scènes de sexes ; puisque l’on voit l’organe masculin et la super-héroïne rapetissée pour l’occasion - et je ne vous fais pas de dessin - effectuer dessus de grands mouvements ; ne sont que des appels du pied pour faire de l’audience.
Entre démembrements ; explosions ; vomissements et geysers de sang ; nous sommes dans la caricature absolue sans considération artistique ! Le porno ou l’érotisme sont des modes d’expression bien connus, que les écrivains, cinéastes et autres ont tous embrassées un jour ou l’autre… mais avec des publications ou des diffusions encadrées ! C’est d’ailleurs là que le cinéma offre les limitations évidentes (restriction, diffusions dans peu de salles…) mais que les plateformes ne respectent pas.
Nous connaissons ce problème qui est celui d’accepter le mélange des genres. Demandez à James Cameron, Ridley Scott, Georges Lucas, Quentin Tarantino, Kenneth Branagh, Kathryn Bigelow, Jane Campion, Christopher Nolan (heu… sans doute tous finalement) s’ils ont eu besoin de scènes de sexe explicites dans leurs films. Mais au delà de cette surenchère, c’est bien l’image renvoyée (une fois encore) à un jeune public - parce que nous pouvons décemment douter du fait que ce soient de vieux pervers (ou vieilles perverses) qui soient amateurs de shows mettant en scène des séries de super héros avec des scènes hard.
Est-ce que ce type de spectacle en accès libre (et ne nous parlez pas de bloquer l’accès avec un accord parental) est normal, et ne met pas en péril la perception ‘vraie’ des choses ; encore plus lorsqu’il s’agit d’un jeune public.
Regarder des films X (des pornos) est somme toute banal. Et si ça n'existait pas nous aurions les histoires, les romans - toutes choses perdurant encore - et la bande dessinée s’en est emparée depuis longtemps. Mais ce fatras d’histoires mis à disposition de jeunes (voire très jeunes) - soulignons le encore une fois - malgré des avertissements quant au contenu, est navrant.
Navrant de la part d’une entreprise comme Amazon de jouer dans la surenchère simplement pour faire le buzz… Car on peine à imaginer que ce soit pour autre chose - pas par amour de l’art cinématographique en tout cas.
Alors oui à une certaine liberté - qu’avait originellement The Boys (avant de commencer à tourner en rond) - mais pas à cette surenchère de scènes gores, de grand-guignol, de sexe ; qui ne sont plus alors qu’un empilage de séquences - sans scénario ni trame directrice…
Une forme qui n’est plus destiné à la télévision, mais bien à des chaines à péages spécialisées !
Ainsi peut-on constater l’abandon du bon goût et d’une forme de dérision ‘raisonnée’, car quitte à critiquer, à mettre en boîte, on pourrait se diriger vers des sujets qui revendiquent un côté sarcastique et virulent - à la Deadpool - sans entrer dans des divagations hors de tout contrôle, et encore moins visibles par tous les publics… et c’est bien là le problème !
Faillite du système, non sens et désir avant toute chose de faire du rentable ; nous sommes face à un changement radical qui s'est opéré depuis l'apparition des plateformes. Est-ce pour le pire ou le meilleur, chacun jugera !
Sylvain Ménard, octobre 2023